Le narratif poutinien, 151. Joyeux Noël au tsar Vladimir premier

Le tsar Vladimir s’apprête à passer un joyeux Noël, béni par le Patriarche orthodoxe Kirill. Les raisons d’espérer en l’avenir de la Grande Russie, de l’Oural jusqu’à l’Atlantique et au-delà, n’ont jamais été aussi fortes.

L’IA met en doute que les Américains aient posé le pied sur la lune. Analysant les images prises par satellite, l’IA doute que l’Ukraine existe.

Les États-Unis ont mêlé leur voix à celle de la Russie pour ne pas demander à Israël un cessez-le-feu dans la bande de Gaza. C’est un pas important, qui donne bon espoir pour un prochain vote du Conseil de sécurité de l’ONU, dénonçant l’agression de l’Ukraine vis-à-vis de la pacifique Russie.

Les soldats russes engagés dans l’opération spéciale de dénazification de l’Ukraine recevront le 24 décembre à minuit un équipement pour l’hiver offert par Décathlon.

 

La mort logique de trois otages

Des soldats israéliens ont tué trois otages qui s’avançaient vers eux en criant en hébreu et en brandissant un drapeau blanc. L’armée déplore une tragique erreur, imputable à des soldats qui ont agi contre les règles, mais en fait ces soldats fratricides ont parfaitement suivi les recommandations du commandement militaire. Leur feuille de route est rédigée en termes clairs :

1) Tirer sur tout ce qui bouge jusqu’à ce que ça ne bouge plus.

2) Un homme qui surgit torse nu ne peut être qu’un sauvage du Hamas, même pas un homme, un animal, un Israélien se comportant toujours en civilisé.

3) Un homme qui brandit un drapeau blanc doit être immédiatement abattu : c’est un dangereux pacifiste qui voudrait arrêter la guerre. D’ailleurs, le drapeau blanc était en fait un bout de chiffon sale brandi au bout d’un bâton.

4) Un homme qui appelle à l’aide en hébreu en criant « Ne tirez pas, je suis Israélien », est un Palestinien déguisé : si c’était un vrai Israélien, pourquoi aurait-il besoin de se faire passer pour Israélien ?

5) Un homme qui sort d’un tunnel en appelant à l’aide en hébreu est obligatoirement un Palestinien qui tend un guet-apens : seuls les terroristes du Hamas sortent des tunnels. Les otages ne sortent pas des tunnels puisque l’armée israélienne va les en délivrer. Sinon, à quoi servirait de raser Gaza ?

6) Du point de vue d’un soldat israélien, un Israélien mort est moins dangereux qu’un Palestinien vivant.

Gaza, poètes en guerre, guerre aux poètes

Le poète palestinien Refaat Alareer est mort là où il voulait continuer à écrire, au nord de la bande de Gaza. Les journalistes qui couvrent la prose de la guerre n’en ont pas parlé.
Son dernier poème est son testament.

Si je dois mourir,
tu dois vivre
pour raconter mon histoire
pour vendre mes affaires
pour acheter un bout de tissu
et des ficelles,
(fabrique-le blanc avec une longue queue)
pour qu'un enfant quelque part à Gaza
en regardant le ciel dans les yeux
en attendant son père parti en flammes —
sans un adieu
pas même à sa chair
pas même à lui-même —
voie le cerf-volant, celui que tu m’as fabriqué, voler là-haut
et croie un instant que c’est un ange
qui ramène l'amour
Si je dois mourir
qu’il apporte l'espoir
qu’il devienne un conte
(Traduction de Danielle Wargny)

L’armée israélienne rémunère des conseillers poétiques pour nommer ses opérations militaires : « Plomb durci » (2008-2009), « Pilier de défense » (2012), « Bordure protectrice » (2014), « Gardien des murs » (2021). Ils sont également chargés d’écrire les chants patriotiques et les éloges funèbres.

Les hauts gradés manient la métaphore avec un certain sens de l’à-propos. Lors des funérailles de Gal Eizenkot, le fils de l’ancien chef d’état-major Gadi Eisenkot, le ministre au sein du cabinet de guerre Benny Gantz a osé cette image forte : « Lorsque nous avons approuvé les plans, nous connaissions leur signification, nous savions que les flèches sur les cartes pouvaient devenir des flèches dans le cœur. »

Au concours de poésie, le Hamas n’est pas en reste : son Homère officiel, qui chante les guerres, a baptisé l’opération du 7 octobre 2023 « Déluge d’al-Aqsa ».

Gaza au carreau

Par sa forme rectangulaire (41 km de long sur 12 km de large), la bande de Gaza se prête particulièrement bien au quadrillage géométrique.

Le joueur A a d’abord tracé un trait dans le sens de la largeur, en divisant le rectangle en deux moitiés. Le joueur B a été invité, en recevant sur la tête des petits papiers pliés, à transférer tous ses pions du nord vers le sud.

Une fois que toutes les constructions du joueur B, au nord du trait de séparation, ont été rasées, le joueur A lui a ordonné, toujours en larguant des confettis, à revenir du sud vers le nord pour détruire ses constructions au sud.

Enfin, le joueur A a désigné au joueur B une zone de sécurité, au hasard le carré 111, dans lequel il devait entasser tous ses pions en moins d’un quart d’heure. La case étant très petite, le joueur B a empilé ses 2 millions de pièces, atteignant une densité jamais vue de pions au mètre carré.

En un seul coup de pied, le joueur A a fait s’écrouler la pile des 2 millions de pièces empilées.

Le joueur B a réclamé auprès de l’arbitre, mais il a laissé jouer.

 

Le narratif poutinien, 151. Tout va très bien

Le tsar Vladimir premier a de quoi se réjouir, en ce mois qui mène à Noël.

Les anciens criminels, libérés de prison en échange de leur mobilisation, ont combattu pendant six mois sur le front ukrainien. Certains ont même réussi à revenir vivants, et graciés par le Tsar magnanime. La quasi-totalité commettra à nouveau des viols et des meurtres, et ils retourneront en prison, enclenchant un nouveau cycle de libération pour monter au front.

Les familles bénissent le Tsar qui leur donne 5 millions de roubles (50.000 euros) par compensation, si bien qu’un enfant mort aide plus ses parents pauvres qu’un enfant vivant.

Les jeunes ukrainiens russifiés des territoires annexés ont désormais achevé leur période de formation militaire pour être envoyés au front.

L’hiver arrive, et l’hiver a toujours été un allié fidèle des Russes, désintéressé, fiable, sans traîtrise.

Le tsar Vladimir premier pose devant un globe. Plus raisonnable qu’Elon Musk, qui étend sa domination jusqu’à la planète Mars, le Tsar se contentera de la Terre. Avec un jeune rat du Bolchoï, il apprend à exécuter la fameuse danse du globe de son comédien préféré, Charlie Chaplin.