dimanche 8 septembre 2019

Yann Moix

Niort dans Sérotonine de Michel Houellebecq, Orléans dans Orléans de Yann Moix : les villes moyennes de province prennent cher dans la littérature, en ce moment.

On a tellement parlé du livre de Yann Moix qu’on peut se dispenser de le lire.

Victime ou bourreau, là est la question : le père, les deux frères. Baudelaire introduit dans Les Fleurs du mal une autre catégorie, un mot grec impossible à écrire et à prononcer : L’Héautontimorouménos. Traduction : le bourreau de soi-même. 
Je suis la plaie et le couteau !
Je suis le soufflet et la joue !
Je suis les membres et la roue,
Et la victime et le bourreau !
Il semble bien que Yann Moix appartienne à cette catégorie du bourreau de soi-même, et qu’en passant à l’écriture, il confonde les formes réfléchies, actives et passives du verbe.

La pire violence que puisse exercer un écrivain consiste à faire disparaître une personne du livre où il aurait dû normalement trouver sa place. Ainsi de Yann Moix qui efface la présence d’un frère. C’est cette absence même qui est l'indice du mauvais traitement.

À l’appel de son nom, le petit Yann Moix entendait Y’a Moi, Y’a Moi. Comment un autre pouvait-il exister ?

Grâce au genre de l’autofiction, l’écrivain gagne sur les deux tableaux, l’auto et la fiction. Il écrit « roman » sur la page de titre, mais dans les interviews, il parle à la première personne en assumant le « pacte autographique », c’est-à-dire le contrat de vérité qui établit l’identité entre l’auteur, le narrateur et le personnage principal : Yann Moix raconte l’histoire de Yann Moix, et il persiste et signe Yann Moix sur la couverture. L’accuse-t-on d’affabuler, il se retranche derrière le contrat de confiance de l’autobiographie ; lui reproche-t-on de laver son linge sale en public ou sa propre famille le menace-t-elle d’un procès qu’il brandit l’étiquette « roman ». L’autofiction lui ménage deux portes de sortie.

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