jeudi 14 avril 2016

Noir


Quand Nicolas Sarkozy prononce la fameuse phrase : « Le drame de l’Afrique, c’est que l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire » (discours de Dakar, 26 juillet 2007), on sent qu’il hésite, comme s’il découvrait à la lecture l’énormité écrite par un autre, et puis, il saute l’obstacle quand même, en se disant que ses auditeurs sont tellement bêtes qu’ils prendront ça pour un encouragement.

Négritude : il fallait être noir pour oser le mot, Senghor, Césaire et les autres. Comme dit Sartre : « il ramasse le mot de “nègre” qu’on lui a jeté comme une pierre ». Humour noir, né d’une meurtrissure : seul un Noir peut forger un néologisme raciste, comme seul un Juif peut raconter une histoire antisémite.

Pourquoi les Noirs ont-ils les dents si blanches ? À force de travailler, un Noir peut avoir une paume de main presque blanche, en tout cas moins noire.

L’incongruité n’est pas qu’un dieu artiste ait imaginé des hommes de différentes couleurs, mais que le sang soit uniformément rouge, et les muqueuses roses. Comme s’Il n’avait eu de fantaisie que pour la partie visible.

J’ai même connu un musicien noir capable de blanchir un couple d’Européens illégitime.

Prenant le RER et les trains de banlieue à des heures différentes, j’ai remarqué que la proportion de Noirs diminue quand le ciel blanchit et augmente quand la nuit tombe. Les Blancs partent plus tard et rentrent plus tôt, pour peupler des bureaux nettoyés par des Noirs, avant leur arrivée et après leur départ. Aux Blancs le jour, aux Noirs la nuit. On s’habitue à ce qui peut paraître une harmonie naturelle des couleurs. Ainsi les minorités visibles deviennent-elles invisibles, en se fondant dans leur élément.