samedi 31 décembre 2022

Le narratif poutinien, 127. Pelé, un roi

Le tsar Vladimir premier tient à saluer la mémoire du roi Pelé, qui est au ballon ce que lui, le tsar Vladimir premier, est à la politique.

Ce n’est pas lui qui aurait exclu injustement les athlètes russes des compétitions internationales.

C’était un homme fort, et il a soutenu les régimes forts dans son pays, sans rien dire, en se taisant, simplement en tapant dans un ballon. Il a fait du foot une religion, et cette religion-là, mondiale, a remplacé l’autre, l’opium du peuple.

Grâce à son incroyable jeu de jambes, on a compris que le sport n’était pas politique, qu’il y avait le foot d’un côté et la politique de l’autre, que les gouvernés devaient s’occuper de foot pendant que les gouvernants s’occupaient d’eux.



samedi 24 décembre 2022

Le narratif poutinien, 126. Noël aux tisons

Le tsar Vladimir premier, en cette veillée de la Nativité qui émeut son cœur de père, a fait part à sa Cour de son étonnement devant la naïveté de ces grands enfants d’Américains, qui parlent de « bombe arctique » pour expliquer le froid polaire qui s’abat sur leur pays. N’ont-ils pas compris le lien de cause à effet avec le voyage du clown qui parle au nom d’un pays qui n’existe pas ?

Le Dieu des orthodoxes russes, le seul vrai Dieu, les punit d’entretenir une guerre injuste par la livraison d’armes à l’ennemi, en leur envoyant un froid très sibérien.

Quand on regarde une carte du monde dépliée, la Sibérie est à des milliers de kilomètres, mais les masses d’air froid se sont engouffrées par le pôle Nord, là où on est voisins.

Comme disait un poète, la guerre froide est devenue une opération militaire spéciale à l’âge de glace.

Les Ukrainiens qui croient à une trêve de Noël ont oublié que pour mériter des cadeaux, il faut avoir été sages et obéissants.


 

mardi 20 décembre 2022

Le narratif poutinien, 125. Qu’un véritable ami…

Le tsar Vladimir premier a rendu une visite de voisinage à son grand ami Alexandre Loukachenko, le président de la Biélorussie.

Sur la photo de notre tsar et de son ami, on voit un homme plus grand et gros que l’autre, mais l’image est trompeuse. Le plus grand n’est pas celui que l’on pense ; il le reconnaît lui-même, comme le chevalier fait allégeance à son Seigneur et Maître : « La Russie peut se passer de nous, et nous ne pouvons pas nous passer d’elle. Est-ce que nous sommes capables de protéger tout seuls notre indépendance, sans la Russie ? Non ! » Joignant le geste à la parole, il a porté la main au collet, comme pour réajuster sa cravate, en tâtant l’endroit où la corde pourrait se serrer.

Dans Biélorussie, il y a Russie, incrustée comme la marque du propriétaire.



lundi 12 décembre 2022

Le narratif poutinien, 124. Échange

Le tsar Vladimir premier se félicite de l’échange entre la basketteuse américaine Brittney Griner et le héros russe Viktor Bout, arbitrairement condamné par la justice aux ordres de la Maison Blanche à 25 ans de prison et détenu depuis 11 ans.

La comparaison entre les deux monnaies d’échange montre un net déséquilibre. D’un côté une femme de couleur tatouée, fumant du cannabis, et attendue à son arrivée par sa femme ; de l’autre côté un patriote, végétarien comme Hitler, artiste peintre comme Hitler, vivant de l’honnête commerce des armes, utile à sa patrie, mâle blanc attendu par toutes les femmes russes.

Elle met des ballons dans un panier, mais elle en rate beaucoup ; lui met des balles dans la tête des ennemis, sans jamais manquer sa cible.

Même aux USA, certains Américains pensent que c’est dissymétrique.






mercredi 7 décembre 2022

Le narratif poutinien, 123. Blanc

Grâce au tsar Vladimir premier, la saison du blanc commence cette année avec un mois d’avance.

Les canons lance-missiles ont été remplacés par des canons à neige qui recouvrent le territoire de l’Ukraine d’un blanc linceul.

Quand le beau temps reviendra, les prairies vertes et les champs de blé jaunes seront uniformément blancs, comme des champignons poussés à l’abri de la lumière, et la surface de ce qui était l’Ukraine sera passée au blanco sur les cartes de géographie.

Blanc était aussi l’écran du simulateur de pilotage dans lequel avait pris place le tsar. Le pilote peut ne pas regarder la route, sans courir de danger. Au montage, on a ajouté la route qui défile et le pont de Crimée, au loin.


 

mercredi 30 novembre 2022

Le narratif poutinien, 122. Art russe

Le tsar Vladimir premier aime les arts, tous les arts, la peinture, la sculpture, l’art de la guerre, mais surtout l’art russe.

Dans chaque ville ukrainienne libérée par l’armée russe, les musées sont vidés et les œuvres mises à l’abri.

Comme il n’y a pas d’art ukrainien, ces œuvres appartiennent à l’art russe. Leur transfert évite que les soldats ennemis détruisent leurs propres œuvres par vengeance quand ils s’apercevront qu’elles font partie du patrimoine russe.

Les villes évacuées par les Russes seront rasées mais les œuvres d’art seront sauvées, et elles seront à nouveau accrochées, avec de nouveaux cartels, dans des musées tout neufs, pour une exposition permanente et éternelle.

mercredi 16 novembre 2022

Le narratif poutinien, 121. Désescalade

Le tsar Vladimir doit toujours être cru sur parole. Quand il dit que ce n’est pas la sainte Russie qui a bombardé la Pologne, c’est donc l’Ukraine.

Les militaires ukrainiens profitent de la générosité de leur Grand Frère, qui les a richement dotés autrefois en matériel d’origine soviétique, pour faire croire que les projectiles qu’ils tirent sont lancés depuis le territoire russe.

Ou bien les militaires ukrainiens ne savent pas viser, ou bien ils ont visé délibérément le territoire polonais pour rejeter la responsabilité sur la Russie. Mais on ne fera croire à personne que la Russie peut agresser un pays souverain.

La Russie demande au conseil de sécurité, en vertu de l’article 5 du traité de l’OTAN qui permet d’engager des actions contre les états qui s’en prennent à l’un des pays membres, de déclarer la guerre à l’Ukraine.

Si l’Ukraine n’avait pas tenté de détruire les objets volants russes, deux innocentes victimes polonaises auraient été épargnées.

Le tsar Vladimir vise toujours juste dans la cible, quand ses flèches ne sont pas déviées par une force malintentionnée.

mardi 8 novembre 2022

Le narratif poutinien, 120. Petite Suisse

Le tsar Vladimir premier félicite la Suisse d’être un pays neutre et de vouloir le rester.

Elle mériterait d’avoir un membre permanent au conseil de sécurité de l’ONU pour s’abstenir à chaque fois que les pays occidentaux agressifs tentent de faire adopter une condamnation contre la Sainte Russie.

Elle a refusé de soigner les blessés venant d’Ukraine : les soldats qui une fois guéris retourneront commettre des exactions contre l’armée russe de pacification, les civils qui peuvent cacher des soldats, et même les enfants qui sont déjà contaminés par une idéologie satanique.

Maintenant, la Suisse interdit à l’Allemagne d’envoyer à l’envahisseur ukrainien des munitions fabriquées chez elle pour armer les blindés livrés par Berlin, qui resteront ainsi des engins de guerre neutres et pacifiques comme la Suisse.

Quand la Grande Russie annexera l’Europe, la Suisse, qui n’en fait pas partie, bénéficiera d’un statut à part. Elle pourra continuer à produire librement des coffres-forts pour les oligarques, des vaches et du lait pour les enfants cachés du tsar, et du chocolat.

samedi 29 octobre 2022

Le narratif poutinien, 119. Météo

Le général Hiver tarde à venir. C’est pourtant lui, le commandant en chef, qui a vaincu les troupes du nazi Napoléon et celles d’Hitler.

Mais avec le réchauffement climatique, occasionné par les émissions de gaz carboniques volontairement rejetés par les pays Occidentaux pour détruire la terre entière, il faudra attendre encore quelques mois avant que l’opération spéciale en Ukraine porte ses fruits de saison.

Alors, les fronts seront gelés. Il ne sera plus nécessaire de gâcher des missiles couteux, des drones iraniens, des souches bactériologiques ou de l’uranium enrichi. Le froid sibérien suffira à désukrainiser la petite Russie par glaciation des populations sans électricité ni chauffage.

Comme disait le tsar, dans son adresse quotidienne à son cercle rapproché : « Avant l’hiver, il y a l’automne. » On a entendu un flatteur applaudir, et ajouter : « Après l’hiver, il y aura le printemps. » Le tsar a daigné sourire.

dimanche 23 octobre 2022

Le narratif poutinien, 118. Par le vide

Le tsar Vladimir premier a nommé un nouveau commandant de l’armée en Ukraine, Sergueï Sourovikine, au crâne rasé, pour faire table rase.

La nouvelle stratégie est simple : vider le pays qui s’appelait l’Ukraine par les deux bouts, vers l’ouest en provoquant un exode massif par l’arme du froid, vers l’est en transportant dans le giron protecteur de la Sainte Russie les Ukrainiens qui fuient leur ingrate patrie.

Et quand tout le territoire sera entièrement désert, on fera en sorte qu’il le reste pendant cent mille ans.

On recommencera la même opération dans les autres pays voisins de la Sainte Russie, de telle sorte qu’elle soit entourée d’un no man’s land de plusieurs centaines de kilomètres, une ceinture de protection, un cordon sanitaire pour tenir à distance la décadence occidentale.

Faute d’avoir pu habiter la terre d’Ukraine, on peut la rendre inhabitable.


 

samedi 22 octobre 2022

Le narratif poutinien, 117. Ô ma main droite

Sois sage, ô ma main droite, et tiens-toi plus tranquille.

Cramponne-toi au bord de la table, comme la pince de crabe se saisit de sa proie.

Reste bien au chaud de la main gauche, qui sait te tenir en laisse.

Si on te tend la main droite, serre avec la gauche, la main du cœur.

Sois sage, ô ma main droite, et tiens-toi plus tranquille.

Ou bien bouge sans cesse, en faisant de grands moulinets dans l’air, pour cacher que tu ne peux pas rester immobile.

Dis-toi que la main gauche ne tremble pas, et qu’elle peut toujours appuyer sur une détente, une gâchette ou un bouton.


 

dimanche 16 octobre 2022

Le narratif poutinien, 116. Réquisition

Sensible aux problèmes d’approvisionnement en carburant que connaît actuellement la France, le tsar Vladimir premier a proposé sa médiation dans ce conflit qui affecte le moral des consommateurs.

Depuis qu’il a déclaré qu’il se laisserait anéantir par une arme nucléaire sans répondre, le président Macron premier est devenu un ennemi fréquentable, et il mérite que le tsar vienne à son secours.

La pénurie de carburant est provoquée par la guerre que l’Ukraine mène contre la Russie, et qui la contraint à remplir les réservoirs de son matériel militaire défensif en fermant les robinets d’approvisionnement.

Mais il y a une autre cause à ces pompes vides : la pernicieuse démocratie occidentale qui permet aux ouvriers de se mettre en grève et de bloquer la vie du pays.

Ainsi le tsar propose-t-il deux mesures de bon sens pour remplir les réservoirs : suspendre les livraisons d’armes à l’Ukraine pour négocier aux conditions du pays qui possède les réserves énergétiques ; prendre modèle sur le fonctionnement des institutions de la Grande Russie pour en finir avec le désordre démocratique.


 

lundi 10 octobre 2022

Le narratif poutinien, 115. Citoyens d’honneur

Après Gérard Depardieu et Ségolène Royal, le tsar Vladimir premier a signé un oukase promouvant à la dignité de citoyens russes deux nouveaux bienfaiteurs de la Sainte Russie, auxquels sont accordés l’asile politique, et une datcha.

— le lanceur d’alerte Edward Snowden, bienvenu chez nous, surtout s’il apporte de nouvelles informations secrètes sur la NSA et sur la CIA.

— le génie connecté Elon Musk, qui a trouvé une porte de sortie pacifique à la guerre menée par l’Ukraine, aux conditions de la Russie : reconnaître l’annexion de la Crimée, organiser des plébiscites dans les territoires conquis en invitant l’ONU à surveiller le dépouillement du vote, et désukrainiser l’Ukraine en la neutralisant. Afin de vider l’Ukraine de tous ses occupants, Elon Musk propose de mettre à leur disposition ses capsules SpaceX pour les déménager sur Mars.

vendredi 7 octobre 2022

Le narratif poutinien, 114. Cadeau d’anniversaire

Pour son soixante-dixième anniversaire, le tsar Vladimir premier a été très sensible aux messages d’affection qu’il a reçus du monde entier. Une carte de vœu d’un enfant ukrainien, récemment soustrait à l’influence pernicieuse de ses parents et mis à l’abri dans une famille d’accueil russe, l’a particulièrement touché par sa simplicité : « Longue vie à toi, ô notre Tsar bien-aimé, que le Dieu de la Sainte Russie t’accorde une vie centenaire. »

Maintenant que la Douma a approuvé le rattachement à la Russie des quatre régions libérées, les troupes russes vont répondre à l’appel des dirigeants du Mali, du Burkina, du Niger et du Tchad, pour les délivrer du joug de la France. Ces quatre pays qui ont de profondes racines slaves ont vocation à rejoindre la Fédération de Russie.

Le discours prononcé par le tsar contre l’Occident impérialiste et contre les colonisateurs pourra être rediffusé, en changeant quelques noms de pays. Il est toujours d’actualité.

À la fin de la cérémonie, l’hymne russe sera suivi par la fanfare de Wagner.



samedi 1 octobre 2022

Le narratif poutinien, 113. En russe

Le tsar Vladimir premier est sorti très satisfaisant de son discours du 30 octobre 2022 à l’occasion de l’annexion de quatre territoires d’Ukraine occupés illégalement par des Ukrainiens.

Il n’avait devant lui que des hommes blancs et hétéros assis, à l’exception de quelques femmes blondes, ce qui rassure quant à la virilité des forces russes et à l’inexistence d’un troisième genre.

Les invités ont applaudi aux passages qui leur ont été signalés et ils se sont levés aux bons moments.

Il a réussi à fracturer l’opinion occidentale monolithique qui ne s’était jamais auparavant posée de questions sur le colonialisme, l’impérialisme, le racisme, le pillage des ressources naturelles, etc.

À la fin de la grosse poignée de dix mains, le tsar a réussi à extraire les deux siennes sans dommage.

La place Rouge était noire de monde. Les concerts en public sont rares.

Pour conclure son volumineux discours, le tsar Vladimir premier a cité un grand poète et penseur patriote, Ivan Iline : « Si j’estime que ma patrie c’est la Russie, ça veut dire que j’aime en russe, que je pense en russe, que je chante en russe, que je parle russe. » Une main avait ajouté au crayon sur la feuille : « que je tue en russe, que je torture en russe, que je viole en russe », mais le tsar était arrivé à la fin de son temps de parole.
 


mercredi 28 septembre 2022

Le narratif poutinien, 112. Gaz et eau

La rhétorique mise en œuvre dans le narratif poutinien est suffisamment enfantine pour être comprise par le peuple. C’est celle des cours de récréation : c’est pas moi, c’est lui.

La figure principale prend la forme d’une inversion, d’un retournement en miroir : l’agresseur devient l’agressé, le bourreau la victime, etc. Il suffit de copier/coller le discours d’en face, mais en négatif.

Même les revers passent pour des coups droits.

Après avoir tout de suite émis l’hypothèse d’un attentat sur les gazoducs Nord Stream, les autorités russes demandent en urgence une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU pour démasquer le terroriste. Le coupable est celui à qui profite le crime, c’est bien connu mais ça se discute. L’identification est plus simple si on désigne pour responsable le maître en inversion rhétorique : après avoir mis de l’eau dans le gaz, le saboteur est celui qui a mis du gaz dans l’eau.

mardi 27 septembre 2022

Le narratif poutinien, 111. Syllogisme

Lors de sa rencontre avec le tsar Vladimir premier à Sotchi, le 26 septembre 2022, le président biélorusse Loukachenko a parfaitement su maîtriser l’argumentation en trois temps.

1. Personne ne tolérera l’humiliation, cela n’est jamais arrivé au peuple russe.
2. Nous ne pouvons pas perdre.
3. Donc nous gagnerons.

Le président français Macron en était resté à la prémisse majeure du raisonnement, en affirmant : « Il ne faut pas humilier la Russie. »
On peut l’aider à compléter le syllogisme :
2. L’humiliation consisterait à perdre.
3. Donc la Russie doit gagner.

lundi 26 septembre 2022

Le narratif poutinien, 110. Signes encourageants

Malgré les fausses rumeurs orchestrées par les médias occidentaux, les bonnes nouvelles se multiplient.

Après l’exode des Ukrainiens, la fuite des Russes aura pour conséquence l’effondrement des pays de l’Ouest sous le poids des réfugiés.

Au milieu des déserteurs fuyant le devoir sacré de défendre la Sainte Patrie, se glissent quelques saboteurs.

En Italie, arrive un gouvernement autoritaire avec lequel il sera possible de s’entendre pour que les oligarques persécutés retrouvent une place au soleil.

Le commandement militaire a reconnu des erreurs dans la méthode de recrutement après que le tsar Vladimir premier lui-même (bientôt 70 ans, malade, très occupé) a reçu une convocation pour se présenter au centre de mobilisation.

mardi 20 septembre 2022

Le narratif poutinien, 109. Funérailles

Sept pays n’ont pas été invités aux funérailles de la Reine : la Russie, la Bélarus, la Birmanie, la Syrie, l’Afghanistan, la Corée du Nord et le Venezuela. Leurs représentants seront assis au premier rang lors des funérailles du tsar Vladimir premier, qui auront lieu après 70 ans de règne.

Le tsar a jugé cette mise au ban « blasphématoire » et « immorale », en se plaçant au point de vue des valeurs qui sont toujours les siennes, la religion et l’éthique.

La reine Elizabeth II a eu droit aux funérailles du siècle ; celles du tsar seront les funérailles du millénaire.

vendredi 16 septembre 2022

Le narratif poutinien, 108. The Queen and the Tsar

Avant que les invitations ne soient lancées, le tsar Vladimir premier avait fait savoir au monde entier qu’il n’assisterait pas aux funérailles de la Reine Elizabeth II, mais désormais que son nom ne figure pas sur les listes officielles, il proteste vigoureusement contre cette non-invitation qui le met devant le fait du Prince en l’empêchant de la décliner.

Quand on pense que Churchill promettait à son peuple du sang et des larmes en luttant contre les nazis, et que le gouvernement de sa Gracieuse Majesté a choisi de répandre le sang et les larmes en fournissant armes et soutiens à ces mêmes nazis, on se dit que quelque chose est pourri au Royaume-Uni.

« Désormais les élites britanniques sont aux côtés des nazis », a déclaré la porte-parole du Kremlin, mais on peut attendre que l’opinion publique, dans une démocratie bien constituée, se retourne contre sa classe dirigeante pour imposer une politique diamétralement opposée, avec la même unanimité que l’opinion publique russe se déclare favorable à l’intervention militaire spéciale.

La mort fait oublier les petites querelles humaines entre les vivants : quand le tsar mourra, ce qu’à Dieu ne plaise, il accepte par avance que tous les présidents et autres dirigeants du monde viennent rendre hommage à son long règne et à son œuvre civilisatrice.

Il ne tiendrait qu’au tsar d’envoyer un missile sur l’abbaye de Westminster, quand les cent têtes couronnées se courberont dans un même recueillement : de tous ces personnages, il n’est plus rien resté.

mardi 13 septembre 2022

Le narratif poutinien, 107. Sous contrôle

Petite fuite d’huile sur le gazoduc Nord Stream 1, obligeant à un arrêt total des livraisons vers l’Ouest, jusqu’à nouvel ordre : sous contrôle.

Centrale de Zaporijia bombardée, réacteurs à l’arrêt, réseau électrique déconnecté : sous contrôle.

Retrait organisé des forces russes pour regrouper les armées là où il faut quand il faut, selon le programme minuté depuis le début de l’opération spéciale, en attendant les avancées prévues d’après le calendrier établi : sous contrôle.

Mise en scène des chars Z détruits, faisant croire à une déroute, en vue de griser l’ennemi par l’illusion de la victoire et de provoquer un sursaut dans la population russe : sous contrôle.

Têtes nucléaires bénies par le patriarche Kirill, Dieu ne permettant jamais que la Grande et Sainte Russie soit défaite : sous contrôle.

Parkinson de la main droite du tsar Vladimir premier : sous contrôle.

vendredi 9 septembre 2022

Le narratif poutinien, 106. Funérailles planétaires

Le tsar Vladimir premier a fait savoir au monde qu’il ne se rendrait pas aux obsèques de la Reine, en raison d’un emploi du temps chargé.

La Reine pourrait profiter de sa présence pour ressusciter en tailleur jaune et bleu.

Ses corgis n’aiment pas le tsar. C’est une sale race de chiens roquets. Le tsar préfère les chiens utilisés dans l’armée russe, les mêmes qui accompagnaient les soldats nazis.

Les éphémères Présidents, révocables démocratiquement et éjectables, risqueraient de manifester à cette occasion leur jalousie à l’égard du tsar, dont le règne sera aussi long que celui de la Reine, très aimé, et dont la disparition (le plus tard possible : God save the Tsar !), fera l’objet d’un semblable hommage unanime et de funérailles planétaires, avec des fleurs jetées au passage du convoi transportant sa dépouille sacrée.



mercredi 7 septembre 2022

Le narratif poutinien, 105. Gaz et pétrole

À cause du pétrole, les prix flambent.

À cause du gaz, les prix explosent.

La guerre en Ukraine fait pression sur le prix du gaz.

Le tsar Vladimir premier a mis en garde les pays occidentaux : réduire la consommation d’énergie peut provoquer une explosion sociale.

N’oubliez pas de fermer le gaz avant de sortir.

mardi 6 septembre 2022

Le narratif poutinien, 104. Centrale de Zaporijia

Le tsar Vladimir premier a pris connaissance du rapport de l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique) sur la centrale de Zaporijia. Selon ce rapport, « la situation est intenable ». Le tsar s’est fait traduire le mot anglais « untenable », ne le comprenant pas, puisque les Russes tiennent la centrale.

Le directeur général de l’AIEA, M. Grossi, prétend que « l’intégrité physique de la centrale a été violée à plusieurs reprises ». L’accusation de viol n’est pas nouvelle, portée par les médias occidentaux contre l’armée russe, mais on n’avait jamais osé un mensonge aussi énorme.

Jusqu’à présent, les experts occidentaux décadents maintenaient une frontière étanche entre le nucléaire civil et le nucléaire militaire. Les Russes ont victorieusement démoli le mur de séparation.

Un seul réacteur de la centrale marche encore, pour fournir l’énergie nécessaire au refroidissement des réacteurs. Cette idée plaît beaucoup au tsar, d’une centrale qui ne sert qu’à elle-même, sans fournir d’électricité à l’extérieur.

Pour faire face à la pénurie de gaz, de pétrole et de charbon, les pays occidentaux rouvrent leurs centrales nucléaires fermées ou en construisent de nouvelles. Ce qui est une bonne nouvelle pour de futures occupations militaires.

Vus de haut, les six réacteurs de Zaporijia ressemblent à des interrupteurs avec des boutons rouges. Le doigt du tsar le démange.
 


lundi 5 septembre 2022

Le narratif poutinien, 103. Ségolène et Matteo, citoyens russes

Le tsar Vladimir premier a signé aujourd’hui le décret qui accorde la citoyenneté russe à deux éminentes personnalités : madame Ségolène Royal et monsieur Matteo Salvini.

L’ancienne candidate à la présidence de la République française, bien qu’elle appartienne à l’Occident décadent, n’est pas dupe de la propagande ukrainienne mensongère. Elle ne s’est pas laissée abuser par « la maternité bombardée » ni par « le récit de viol d’enfant pendant sept heures sous les yeux des parents ». Comment des choses pareilles seraient-elles possibles ? Elles sont si inhumaines qu’il faut qu’elles soient inventées. Elle sait bien que les soldats russes ne sont pas capables de telles atrocités. Ce qui est monstrueux, elle l’a bien dit, ce ne sont pas ces crimes, qui n’existent pas, mais « d’aller diffuser des choses comme ça uniquement pour interrompre le processus de paix ». Il ne pourra commencer qu’au moment où les Occidentaux ne parleront plus des crimes de guerre. Le tsar propose que madame Ségolène Royal, qui n’a pas l’habitude de se taire, soit nommée modératrice dans les futures négociations de paix.

Et un autre passeport pour monsieur Matteo Salvini, dirigeant du parti d’extrême-droite italien. Il a bien compris que les sanctions contre la Russie ne servent à rien, que ses coffres se remplissent, et que les Occidentaux sont à genoux. Il a conclu, sagement, qu’il est essentiel de repenser la stratégie européenne pour sauver les entreprises, les emplois et le pouvoir d’achat. La Russie est prête à tendre la main pour relever cet homme fort à genoux. Entre hommes virils partisans d’un régime autoritaire, on s’entend pour manger les plus petits, en attendant que les forts se mangent entre eux. À la fin, c’est l’ours russe qui gagne.

samedi 3 septembre 2022

Le narratif poutinien, 102. Emploi du temps

Le tsar Vladimir premier n’a pas pu assister aux obsèques de Mikhaïl Gorbatchev, en raison d’un emploi du temps chargé.

En effet, le samedi est le jour où le tsar prépare les attaques de la semaine suivante, en piquant des punaises sur la carte de l’Ukraine, ici un hôpital, là une école, là-bas une gare, tiens pourquoi pas.

Il est aussi très occupé avec les ingénieurs qui mettent au point des ventilateurs géants destinés à pulser de l’air très froid, depuis la Sibérie, vers les pays occidentaux, pendant toute la période hivernale.

En outre, il a signé des invitations officielles proposant le droit d’asile en Russie à l’imam Hassan Iquioussen, antisémite et misogyne, passé en Belgique, et à ce jeune homme courageux qui a poignardé Salman Rushdie, en fonction de l’adage « les ennemis de mes ennemis sont mes amis ».

Et même s’il avait eu le temps, a dit le tsar à ses proches, il n’y serait pas allé : le dernier président de l’URSS a été le dernier des derniers.

mercredi 31 août 2022

Le narratif poutinien, 101. Gorbatchev, éloge funèbre

Le tsar Vladimir premier a tenu à réagir à chaud, avec le sang froid qui est le sien, au décès de Mikhaïl Gorbatchev, dont les Russes se souviennent qu’il fut à l’origine de « la plus grande catastrophe géopolitique du XXe siècle », et même de tous les temps.

Il est mort à 91 ans, ce qui laisse au tsar encore 20 ans de règne.

Comme il était devenu gâteux, qu’il était silencieux et détesté, il n’a pas été nécessaire de constater qu’il s’était suicidé en absorbant volontairement une forte dose de poison.

On disait que sa tache sur le front ressemblait à la carte de l’Afghanistan, dont les troupes soviétiques se sont retirées en 1988. Le tsar s’est fait tatouer la carte de l’Ukraine sur la fesse gauche. Il s’assoit dessus.

Les obsèques de Mikhaïl Gorbatchev auront lieu dans la cathédrale Saint-Basile-le-Bienheureux, sur la place Rouge. Les dirigeants du monde entier y seront invités. Ceux d’Occident seront placés dans le soubassement, facile à fermer pour leur sécurité.

dimanche 28 août 2022

Le narratif poutinien, 100. Enfin

Enfin, des voix sensées s’élèvent pour réclamer une solution raisonnée.

Enfin, les organisations internationales parlent d’un territoire disputé, des belligérants, des torts partagés.

Enfin, l’opinion reconnaît où est son intérêt bien compris : dans la bonne chaleur l’hiver avec le gaz russe, forcément russe, la bonne vie du chien gras attaché à son pieu, la paix animale des bienheureux esclaves.

samedi 27 août 2022

Le narratif poutinien, 99. Planification

Nous avançons, nous nous enlisons, nous reculons, selon un plan mûrement réfléchi de longue date, en suivant le programme établi. Même l’imprévu a été prévu, minutieusement.

Il était ainsi écrit que les médias occidentaux diffuseraient de fausses informations sur nos intentions initiales de prendre Kiev en trois jours, d’assassiner le clown et de faire tomber l’Ukraine comme un fruit mûr, et qu’ils raconteraient ensuite que nous avons été bien étonnés de la résistance du peuple ukrainien. Mais aurions-nous commencé notre opération militaire spéciale si nous n’avions pas anticipé ce scénario hautement imprévisible ?

Les mathématiciens russes sont aussi forts en calculs d’improbabilités que nos informaticiens en attaques cybernétiques.

On a pu lire que les attentats et les sabotages commis par les Ukrainiens déstabilisaient nos prévisions. C’est oublier que les attentats et les sabotages font partie du plan global, puisque c’est nous qui les organisons pour accréditer l’idée que les Ukrainiens auraient peut-être une chance de s’en sortir, et finalement mieux les désespérer, eux et leurs soutiens.

Le plan global, dans ses tenants et ses aboutissants, est connu du seul tsar Vladimir premier, qui tous les soirs, dans le silence de son abri antiatomique du Kremlin, compare les nouvelles avec ce qui est écrit depuis le 23 février, le jour d’avant, et il constate, en gardant la tête froide et l’air serein, que tout est sous contrôle, au missile tiré et au mort tombé près.

jeudi 25 août 2022

Le narratif poutinien, 98. Ingratitude

Sous ce titre, le tsar Vladimir premier a noté dans son carnet intime quelques fines pensées choisies.

Les Occidentaux devraient remercier les Russes de les avoir poussés à la sobriété énergétique*. Sans nous, ils auraient continué à crever de chaud en hiver, à éclairer les rues et les magasins en pleine nuit, à laisser les portes ouvertes, ce qui n’est pas bon pour la planète.

Et s’il n’y avait pas la Sainte Russie, comment les dirigeants occidentaux auraient-ils fait admettre la fin de l’abondance et de l’insouciance à leur peuple ? Sans nous, le peuple aurait pu avoir la tentation de demander aux profiteurs de faire des sacrifices.

Les Russes sont la tête de Turc* qui ressoude les sociétés en morceaux contre un ennemi commun. Merci la Russie*.

Ils veulent même interdire les vols des jets privés de leurs riches à eux. S’ils n’avaient pas pris de sanctions contre nos oligarques, comment l’idée leur serait-elle venue ?

* En français dans le texte.

mercredi 24 août 2022

Le narratif poutinien, 97. Anniversaires

Sur le carnet intime du tsar Vladimir premier (traduit du russe) :

Aujourd’hui 24 août 2022, 31e anniversaire de l’indépendance de l’Ukraine, d’après les médias occidentaux. Quelle indépendance ? Quelle Ukraine ?

Cet anniversaire coïncide avec le sixième mois de la guerre en Ukraine. Quelle guerre ?

Aujourd’hui 24 août 2022, me suis baigné dans la piscine couverte de la datcha du cap Idokopas. Ai longuement regardé la mer, Noire. Rien.

lundi 22 août 2022

Le narratif poutinien, 96. Pensées intimes

Le tsar Vladimir premier a consigné quelques pensées dans son carnet intime, inspirées par l’actualité.

J’apprends que la voiture piégée de Daria Douguina était une Toyota Land Cruiser, de marque japonaise et portant un nom anglais. Il est temps que les idéologues du régime, surtout les ultranationalistes, roulent en voitures fabriquées en Russie.

Ça m’en explose une sans faire bouger l’autre (dirait celui que je ne prends pas au téléphone à chaque fois qu’il m’appelle).

Tweet du patriarche Kirill : « Qu’Alexandre Dougine ait pris une autre voiture et que sa fille ait sauté à sa place prouve l’existence de Dieu, et Dieu est avec la Sainte Russie. »

Le boxeur ukrainien Oleksandr Usyk a conservé son titre de champion du monde de boxe dans la catégorie des poids lourds. S’il en fallait encore une, c’est la preuve que tous les Ukrainiens sont des brutes.

vendredi 19 août 2022

Le narratif poutinien, 96. La centrale de Zaporijia

Le tsar Vladimir premier tient à faire savoir ce qui suit.

Faute d’avoir conquis l’Ukraine en trois jours, comme prévu, on peut la rendre inhabitable pour 3 000 ans (environ), et le reste de l’Europe aussi.

Il y a une frontière entre l’Otan et la Grande Russie, mais pas de frontière pour les nuages chargés de particules. Le tsar a décrété que les vents dominants souffleront désormais d’est en ouest.

L’Ukraine c’était ce pays qu’on distinguait sur les cartes, jaune comme les blés et bleu comme le ciel. C’est désormais une tache blanche sur la mappemonde, comme ces terres inconnues sur les cartes géographiques anciennes.

Les capteurs de surveillance sur le site de la centrale de Zaporijia ayant été endommagés, il s’ensuit que le taux de radioactivité n’a pas augmenté.

jeudi 18 août 2022

Le narratif poutinien, 95. Remerciements aux journalistes

Le tsar Vladimir premier remercie les journalistes occidentaux qui commencent toutes les mauvaises nouvelles économiques par ce préambule : « En raison de la guerre en Ukraine… ».

Il remercie également le consultant militaire d’une chaîne française d’informations en continu qui a salué « la bonne dynamique de la victoire des Russes », en ajoutant que si les armées n’avançaient plus, c’est qu’elles se préparaient à l’attaque.

Le tsar s’est fait expliquer une expression française difficile à traduire littéralement en russe : « Les pays du Nord, normalement neutres, ont changé leur fusil d’épaule depuis la guerre en Ukraine. » La « guerre » se traduit désormais par « intervention militaire spéciale », même les traducteurs automatiques ont compris, mais le verbe et son complément nécessitent le détour par une équivalence.

Enfin, le tsar remercie chaleureusement les journalistes officiels russes qui exaltent la Crimée, ce paradis pour les touristes.

vendredi 12 août 2022

Le narratif poutinien, 94. Céline, Guerre (pages inédites, suite 3)

Sur le front, qu’est partout et nulle part, y a du nouveau, et pire qu’avant. C’est encore Ferdinand qui peut raconter. Quand les galonnés et chamarrés de tous les crachats dorés de la Grande Russie ont vu que les jeunes recrues se faisaient tirer comme des lapins russes, et que les appelés répondaient pas, pas plus cons que les autres ils avaient quand même fini par comprendre où on les envoyait, alors ils ont eu une idée, la seule peut-être de leur vie à obéir, qu’ils ont proposée comme ça au chef suprême : aller les chercher en prison.

T’as tué ton père et ta mère et t’en as pris pour trente ans, eh bien tant mieux, tu vas pouvoir tuer autant que tu veux, et on ira rien te demander. Chaque petit frère ukrainien que tu ramèneras par les pieds, ça comptera pour un an de remise de peine. Et l’autre, tu as violé ta sœur et ta fille, on a besoin de gars bien emmanchés comme toi, tu vas pouvoir jouir à mort.

Ils refusaient pas, les gars, plutôt que de pourrir en prison, ils n’avaient rien à perdre, même pas la vie.

Au début, les gradés avaient pas voulu leur donner des armes à feu, ils se méfiaient d’eux, les criminels aux bas instincts, des fois qu’ils auraient descendu leurs chefs. Seulement des couteaux qu’ils avaient, mais avec ça, ils cartonnaient quand même et revenaient avec un butin de paysans égorgés et de filles éventrées. Alors, on les a fournis en gros calibre.

C’est les plus féroces, foi de Ferdinand. Sur un petit carnet, ils mettent un bâton à chaque dépouille, en soustraction des années de prison qui leur restent.

mardi 9 août 2022

Le narratif poutinien, 93. Le régime de la bonne santé

Les douze médecins particuliers qui veillent sur le tsar Vladimir premier ont publié récemment un bulletin de santé : le tsar se porte à merveille.

S’il se cramponne de la main droite à la table ou au bras des fauteuils, c’est qu’il tient ferme la barre, comme un nouveau Grand Timonier.

S’il envoie des sosies en Iran ou en Biélorussie, c’est qu’il veut éviter les maladies, justement parce qu’il n’est pas malade.

On lit dans la presse dégénérée de l’Occident : « Vladimir Poutine : cancer, maladie de Parkinson, visage gonflé... les rumeurs enflent sur la santé du président russe. » Le tsar a bonne mine. Les journalistes décadents lui trouvent le visage « gonflé » pour faire « enfler » les rumeurs, et pour le plaisir d’un jeu de mots. On lit encore : « L'homme fort du Kremlin a 70 ans alors que l'espérance de vie en Russie se situe, pour un homme, entre 65 et 67 ans. » Et voilà pourquoi le tsar est un homme fort.

Penser à tous les observateurs occidentaux qui spéculent sur ses maladies entretient le tsar dans une forme éblouissante, pour ne pas dire insolente.

dimanche 31 juillet 2022

Le narratif poutinien, 92. La démocratie, le pire des régimes

Sur un autre cahier, un peu plus grand que le petit format réservé aux pensées intimes, le tsar Vladimir premier consigne ses réflexions sur l’Occident décadent. Extraits choisis.

La démocratie est une fiction, citée en exemple par l’Occident quand il fait la leçon aux régimes qu’il déclare autoritaires, alors qu’ils sont solides comme une pyramide avec une base large et une seule tête au sommet.

Où voit-on une police qui s’excuse d’avoir fait une erreur, un chef spirituel qui demande pardon pour le mal commis, un ancien colonisateur qui se repent auprès des peuples colonisés ? Les Forts ne s’excusent jamais, ils écrasent.

Les régimes démocratiques sont faibles parce qu’ils ont des comptes à rendre à l’opinion. Les régimes forts font l’opinion.

Trois pouvoirs indépendants, des partis politiques qui se combattent, des présidents qui doivent laisser leur place au bout d’un ou deux mandats, des gens qui discutent, des médias qui ne disent pas la même chose, et après les Occidentaux prétendent parler d’une seule voix.

En Russie, les seules divisions[1] se comptent en centaines de milliers de soldats et en chars, dans la glorieuse armée.

Sur l’Occident décadent, le tsar est intarissable. Son grand cahier est couvert de phrases écrites dans tous les sens.

[1] En français dans le texte (Note du traducteur).

vendredi 29 juillet 2022

Le narratif poutinien, 91. Principes d’action

Sur un petit carnet qui tient dans la poche, le tsar Vladimir premier écrit ses pensées intimes, quand ses hautes fonctions lui laissent une minute. C’est un document classé « secret défense » dont nous avons pu avoir communication, à titre exclusif. Voici quelques-unes de ces maximes, précieuses pour comprendre les principes qui guident l’action du tsar.
Décide ce qui te plaît, et après tu verras ce qui se passe.

Dans ton combat contre le monde, aide le monde à se détruire.

L’important n’est pas ce que fait le chef, mais que le peuple pense que c’est bien.

Faire peur et créer les dépendances qui rendent l’ennemi impuissant, tout est là.

Nous vaincrons parce que nous sommes la mort. 
Comme on le voit, le tsar agit en cohérence avec ses idées.

lundi 25 juillet 2022

Le narratif poutinien, 90. Bombe à fragmentation

Dans son chapeau haut-de-forme recouvert de peau d’ours, le tsar Vladimir premier a disposé des petits papiers sur lesquels il a écrit une série de messages. Après chaque frappe d’un objectif ukrainien, il tire l’un après l’autre les papiers au hasard, et il envoie les messages à l’agence officielle de communication, qui les diffuse à vingt-quatre heures de distance, en changeant les noms du lieu de la frappe. D’un bombardement à l’autre, les mêmes messages s’enchaînent dans un ordre qui peut varier. Voici par exemple le narratif qui a suivi le bombardement du port d’Odessa, finalement assez logique dans le déroulement des faits.

Premier papier : Les Ukrainiens prétendent que les Russes ont bombardé le port d’Odessa. Ils prennent à témoin le monde entier, crient à la trahison, etc. Le médiateur turc s’étonne de la décision russe, au lendemain de l’accord sur l’exportation du blé.

Papier 2. Les Russes affirment ne pas avoir bombardé le port d’Odessa. Le médiateur turc confirme.

3. Ce sont les Ukrainiens eux-mêmes qui ont bombardé leur propre port pour faire croire etc. Variante : ils visaient une cible russe mais leurs armes sont très imprécises.

4. Les Russes revendiquent le bombardement à Odessa, mais ils ont visé uniquement des cibles militaires. Les bâtiments civils ont pris feu parce qu’ils jouxtaient les entrepôts de munitions et les casernes de soldats.

5. Les Russes font valoir que le bombardement du port d’Odessa n’empêche en rien la sortie des navires chargés de blé : les bombes tomberont à côté.

dimanche 24 juillet 2022

Le narratif poutinien, 89. À la russe

Pour se délasser au cœur de l’été, le tsar Vladimir premier apprend les langues vivantes des pays européens, ayant retenu de César (La Guerre des Gaules) que le conquérant doit pouvoir communiquer avec les peuples dominés. Avant que le russe devienne la langue officielle de l’Europe, il y aura un temps où les langues cohabiteront.

Le tsar parle couramment l’allemand. Il se met au français, en commençant par les expressions où se trouve le mot « russe ».

1. Montagnes russes : technique qui consiste à donner le tournis en enchaînant les montées et les descentes, les hauts et les bas, le chaud et le froid, pour faire peur aux passagers qui croyaient s’amuser.
2. Roulette russe : « jeu de hasard potentiellement mortel consistant à mettre une balle dans le barillet d'un révolver, à tourner ce dernier de manière aléatoire, puis à pointer le revolver sur sa tempe avant d'actionner la détente » (Wikipédia). On peut aussi pointer le revolver sur la tempe d’un Européen et actionner la détente autant de fois que nécessaire.
3. Boire à la russe : vider son verre cul sec, et le jeter par terre. On entend derrière soi un grand bruit de verre brisé.

samedi 23 juillet 2022

Le narratif poutinien, 88. Trois bonnes nouvelles au 150e jour

En sortant de la piscine de son Palais avec vue sur la mer Noire, le tsar Vladimir premier a appris plusieurs nouvelles qui ont dissipé d’un coup ses récentes fatigues de dirigeant très occupé.

Premièrement, la Suisse refuse de soigner les blessés ukrainiens, en qui elle voit des combattants en puissance. Ce pays neutre n’accueille que l’or du tsar, sa maîtresse aussi bien cachée que son or, et ses enfants non déclarés, dont un fils, qui n’est pas un combattant en puissance puisque son père se gardera de l’envoyer au front.

Deuxièmement, les Russes et les Ukrainiens ont signé un accord pour faire sortir les céréales du grenier à blé, mais sur des documents séparés : on n’allait quand même pas mettre la main sur le même papier. La convention paraphée par le représentant russe comportait une clause secrète qui ne figurait pas sur l’autre : les Ukrainiens donnent le blé et les Russes ramassent le blé (en français dans le texte). D’autre part, ces naïfs assis autour de la table n’ont pas vu que la Russie signait de la main droite la sortie des bateaux, et que la main gauche, restée libre, actionnait le bouton du lance-missile, pointé en direction du port d’Odessa. Le premier bateau chargé de blé qui sortira sautera sur une mine, dont il sera facile de dire qu’elle a été posée par les Ukrainiens pour faire croire que les Russes sont responsables.

Troisièmement, la République tchèque commence à détruire un élevage de porcs, construit sur le site d’un ancien camp de concentration où les nazis ont exterminé des roms. Cet élevage de porcs est le bienvenu dans la partie libérée de l’Ukraine, où de vastes espaces au sol récemment remué se prêtent à ce type d’exploitation agricole.

mercredi 20 juillet 2022

Le narratif poutinien, 87. Mégafeux

Prenant quelques jours de vacances bien mérités dans son complexe de repos du cap Idokopas, avec vue sur la mer Noire, le tsar Vladimir premier a regardé sur grand écran les mégafeux qui détruisent une partie de la forêt française.

Ces feux sont en tous points similaires à ceux qu’allument volontairement les paysans ukrainiens dans leurs champs de blé pour affamer le monde. Il est évident que cette tactique de la forêt brûlée est utilisée par l’armée du clown Zelensky, qui envoie des bombes incendiaires loin vers l’ouest dans le but 1) d’accuser la Russie 2) de détourner l’attention 3) de chasser les populations vers l’est afin qu’elles s’enrôlent dans l’armée ukrainienne.

Le tsar Vladimir compatit à cette situation et il conseille fortement à tous les pays d’Europe et aux USA de convertir leurs avions militaires en bombardiers d’eau, pour faire barrage à l’agression des pyromanes ukrainiens.

mardi 19 juillet 2022

Le narratif poutinien, 86. Anéantir

Six mois après sa sortie en France, le dernier roman de Michel Houellebecq a été traduit en russe, sous le titre уничтожить. Pour se délasser, entre deux ordres de bombarder des écoles et des hôpitaux où se cachent des Ukrainiens soldats ou qui pourraient le devenir, le tsar Vladimir premier a demandé au ministre de la Culture de lui résumer le livre.

Il avait entendu dire que Houellebecq anticipait les événements à venir dans ses fictions. Ainsi, il avait prévu les attentats islamistes, les gilets jaunes, enfin des choses dans ce genre-là. Anéantir, c’était un titre prémonitoire pour l’intervention militaire spéciale de la Grande Russie contre les Nazis de l’Ouest. Même pas : dans le roman, il n’est question que de l’anéantissement individuel d’un personnage qui se meurt d’un cancer. La seule chose que le roman annonce, c’est le scandale des maisons de retraite.

Ah si, quand même, Houellebecq parle de la décadence de la civilisation et du Vieux monde : « Même des dirigeants aussi autoritaires et déterminés que le général de Gaulle s’étaient montrés impuissants à s’opposer au sens de l’histoire, l’Europe dans sa totalité était devenue une province lointaine, vieillissante, dépressive et légèrement ridicule des États-Unis d’Amérique. » Là, c’est un vrai voyant qui parle et il a senti le « sens de l’histoire », qui vient de l’Est.

Mais dans l’ensemble, la star mondiale de la littérature française, traduit dans toutes les langues, sauf l’ukrainien qui n’existe plus, a perdu de sa force de prédiction, il est devenu trop sentimental, trop tendre et ramolli avec l’âge. Le tsar Vladimir lui a écrit pour lui proposer le sujet de son prochain roman, un sujet prophétique sur l’avenir de la civilisation.

lundi 18 juillet 2022

Le narratif poutinien, 85. Dans les étoiles

Le tsar Vladimir premier a décoré de l’ordre du tsar Vladimir les trois cosmonautes qui ont déployé à bord de l’ISS les drapeaux des deux Républiques de Donetsk et de Longansk, récemment libérées par les forces russes.

Quand ils sont arrivés en mars dernier à bord de la Station spatiale internationale, les cinq cosmonautes étaient revêtus de combinaisons jaunes et bleues. Trois d’entre eux ont donc changé de couleur. On est sans nouvelle des deux autres Russes, pas plus que des cinq occupants qui complètent la station, quatre Américains dont une femme, et un Allemand.

Sous la photo des drapeaux et des porte-drapeaux, la légende dit : « Nous célébrons à la fois sur Terre et dans l’espace. »

Maintenant que les drapeaux des Républiques pro-russes flottent à 400 km de la Terre, le tsar Vladimir a décrété l’annexion et la russification de l’espace, conformément à sa nouvelle devise cosmique : « On ira les buter jusque dans les étoiles. »

Oleg Artémiev, Denis Matvéïev et Sergueï Korsakov


dimanche 17 juillet 2022

Le narratif poutinien, 84. Céline, Guerre (pages inédites, suite 2)

Il en a vu d’autres, le Ferdinand qui vous parle, des pires à raconter qu’on ne peut même pas croire que c’est vrai, et pourtant, c’est la vraie vérité. Même qu’il pourrait dire, le Ferdinand, comme le peintre Goya des désastres : « Yo lo vi », si le Ferdinand avait pas perdu son latin après tout ce qu’il a enduré.

Ils crevaient de faim, les jeunes qu’on envoyait là où ils ne savaient pas, avec des mini-rations périmées depuis dix ans, parce que les fraîches ne dépassaient pas les gradés qui les gardaient pour eux et pour leur famille, et le reste ils les vendaient aux civils à l’arrière.

Quand ils ouvraient les boîtes de ration, ça sentait le décomposé. Nourrissez-vous sur la bête, qu’ils disaient les gradés à ceux qui se plaignaient, et la première chose qu’ils faisaient, après avoir tué tous les hommes qui bougeaient et violé les femmes qui ne bougeaient plus, c’était de vider les frigos.

Même qu’ils mangeaient à côté des cadavres, ça ne les dérangeait pas, ventre affamé n’a pas d’oreille, et pas de nez non plus ; ils enfonçaient leur groin dans la gamelle et attrapaient avec les doigts, et se remplissaient comme des tonneaux, parce qu’ils ne savaient pas quand ils trouveraient un autre frigo plein. Et là-dessus, ils s’arrosaient avec de la mauvaise vodka de contrebande, qu’ils s’endormaient après comme des cochons.

C’est comme ça qu’on les transperçait, tellement ivres morts qu’ils ne sentaient pas le couteau qui les envoyait dormir tout à fait.

vendredi 15 juillet 2022

Le narratif poutinien, 83. La stratégie HQ8270

Depuis qu’il a adopté le rasoir à double lame, le tsar Vladimir premier (dont certains Occidentaux malveillants disent qu’il est imberbe) s’en inspire pour enseigner la stratégie à ses armées.

Le rasoir électrique Philips HQ8270 est doté de la technologie révolutionnaire appelée « Super Lift & Cut », qui se caractérise par une double lame : la première redresse les poils et la seconde les coupe au plus près.

La nouvelle stratégie de l’intervention militaire spéciale dans le pays qui s’obstine contre l’évidence historique à revendiquer le nom d’Ukraine met en œuvre la double lame : d’abord raser et ensuite russifier.

La tactique HQ8270 s’applique également aux récoltes de céréales : moissonner le blé et le maïs semés par les paysans ukrainiens, puis les vendre en roubles.


jeudi 14 juillet 2022

Le narratif poutinien, 82. Fêt’ nat’

En ce jour de fête nationale française, le tsar Vladimir premier n’a pas eu à décliner l’invitation du président Macron dans la tribune officielle, puisqu’il ne l’a pas reçue.

Il a donc regardé la cérémonie à la télévision. La place de la Concorde paraît bien petite à côté de la place Rouge. Le défilé des troupes à pied, les véhicules blindés légers, les spécimens des Griffons, Jaguars et CAESAr, clairsemés dans le ciel ou sur le pavé, font petit jeu dans une cour de récréation, en comparaison du Jour de la Victoire le 9 mai.

Le tsar a fort apprécié que le bouffon Zelinsky ne prenne pas la parole en tee-shirt kaki sur un écran géant installé au pied de l’Arc-de-Triomphe, et que le président Macron ait parlé du Donbass comme d’une « région contestée ».

Le tsar répondra à l’invitation officielle lancée en 2024 pour les Jeux olympiques et paralympiques de Paris. Les athlètes issus de l’ex-Ukraine pourront concourir sous les couleurs russes, et ils courberont la tête pour recevoir leur médaille au son de l’hymne russe.

mardi 12 juillet 2022

Le narratif poutinien, 82. Mon combat

Au 139e jour de l’opération spéciale visant à libérer l’Ukraine de l’envahisseur ukrainien, le tsar Vladimir premier s’est brusquement rendu compte qu’il n’avait pas écrit de livre.

Certes, il restera dans l’Histoire en raison de ses hauts faits, sa pêche à la truite, sa chasse aux cerfs, et ses actes héroïques, qui suffisent à sa gloire, mais il serait bon qu’a l’exemple des grands hommes il laisse une trace écrite pour la postérité, pérennisant la hauteur de ses actes par la profondeur de sa pensée.

Il est vrai que le recueil de ses discours, ainsi qu’une anthologie de ses bons mots, constitueront un ensemble édifiant pour les générations à venir.

Mais les illustres dirigeants dont il rejoindra le Panthéon peuvent se prévaloir d’une bibliographie. Les œuvres complètes de Lénine totalisent 30 820 textes ; Staline vient derrière avec 16 volumes ; Mao Zédong est l’immortel auteur du Petit Livre rouge.

Le titre Mon combat est déjà pris par le bestseller d’Adolf Hitler. Mais la traduction du titre en russe n’est pas protégée par le droit d’auteur, Моя борьба. Le tsar doit rencontrer dès demain son historiographe officiel.

lundi 11 juillet 2022

Le narratif poutinien, 81. Céline, Guerre (pages inédites, suite 1)

Je l’avais dit, au dernier feuilleton, que je raconterais ce que j’ai vu, tout ce que j’ai vu, même si c’est pas des choses à dire. La putain de guerre, on a pas les mots pour décrire, mais le pire, c’est ce que ça fait remonter du fond de l’homme, tous les remugles des tripes qu’on imagine pas, les dessous du cœur et les égouts de l’âme, enfin tout ce qu’on arrive à cacher en temps de paix, quand on a pas l’occasion de montrer ce qu’on est vraiment.

On en était resté aux petits soldats russes qui descendent des camions zébrés avec un Z sans savoir où ils sont. Ils sont passés avant entre les mains des capos qui les bizutent à mort pour leur endurcir le tempérament, qu’ils disent, et à mort ça veut dire des fois à mort pour de bon, jusqu’à ce que mort s’ensuive, pour voir s’ils sont des hommes. Alors ceux qui en sortent, ils sont fin prêts à torturer à leur tour pour rien, par vengeance de ce qu’on leur a fait subir, et parce qu’ils ne savent faire que ça, cogner, ce qu’on leur a appris sur leur dos, et qu’ils retournent sur les autres.

Ils arrivent sans rien qu’un barda tout maigre, alors ils se paient sur l’habitant, tout ce qu’ils trouvent, même du linge sale à côté des machines à laver, les brosses à dents qui ont déjà servi, dans les maisons éventrées. Faut pas humilier les Russes, que Ferdinand a entendu d’un président, c’est sûr, ils savent le faire tout seuls, s’humilier. Mais peut-être qu’ils savent plus ce que les mots veulent signifier, même humilier, ils savent plus, à force de creuser toujours plus bas que terre, là où fouillent les taupes et les groins des cochons.



dimanche 10 juillet 2022

Le narratif poutinien, 80. Bilan carbone

Après avoir pris connaissance du dernier rapport rendu par le GIEC sur l’urgence climatique, le tsar Vladimir premier tient à attirer l’attention des experts du monde entier sur le bilan désastreux de la guerre menée par les Ukrainiens.

La nature souffre beaucoup. Les missiles réchauffent l’atmosphère, ainsi que la crémation des cadavres. Les usines bombardées libèrent des produits toxiques pour l’air et pour l’eau. Les ruines à évacuer et les villes à reconstruire, même si elles suivent des normes environnementales zéro pollution et à énergie positive, ont un impact certain sur la planète.

On voit même des paysans pratiquant la tactique de la terre brûlée en incendiant volontairement les récoltes de blé et de maïs pour augmenter l’effet de serre.

L’Allemagne est contrainte de remettre en marche des centrales au charbon, et c’est très mauvais pour la santé des Européens.

Il serait préférable que l’Otan convertisse ses avions militaires en bombardiers d’eau pour lutter contre les incendies occasionnés par la montée des températures consécutives à l’usage des armes offensives occidentales.

Si l’Europe reste indifférente aux pertes humaines qu’elle provoque, elle pourrait au moins se montrer sensible à la destruction de la nature.



samedi 9 juillet 2022

Le narratif poutinien, 79. Choses sérieuses

Depuis son fauteuil en majesté, au milieu d’un grand tiers de cercle vide, et face à ses sujets qui l’écoutent en rond (une seule femme, en bleu), le tsar Vladimir premier a fait savoir au monde que « les choses sérieuses » vont commencer maintenant.

Jusqu’à présent, le monde n’a encore rien vu. C’était un lever de rideau, des escarmouches d’opérette, une simulation avec des figurants qui se relevaient après les tirs à blanc et lavaient la sauce tomate qui imitait le sang. Les soldats de l’armée de libération courtisaient avec respect des femmes consentantes.

Mais là, depuis que les spectateurs ont entrepris d’intervenir dans le spectacle pour perturber son bon déroulement, on va voir ce qu’on va voir, de vrais missiles avec de vraies ruines et de vrais morts, des soldats neutralisés et faits prisonniers, en respectant, bien entendu, la Convention de Genève sur les lois de la guerre.

Après les « choses sérieuses » qui occupent en général plusieurs actes de la pièce, peut venir la « catastrophe », le moment au théâtre où tout bascule. Mais le tsar assure qu’on n’est pas encore là. Il suffit que les spectateurs demandent à la victime d’arrêter de se débattre et qu’elle se soumette au bourreau.



mercredi 6 juillet 2022

Le narratif poutinien, 78. Bojo

Dans sa grande magnanimité, le tsar Vladimir premier a fait savoir, via l’ambassadeur de Grande-Bretagne en Russie, résidant rue du Donbass libéré, qu’il proposait d’accueillir Boris Johnson après sa destitution.

Le tsar veut bien passer par-dessus les moqueries du premier ministre britannique, son soutien à l’ex-Ukraine, ses propos inamicaux sur l’intervention de l’armée de libération russe, qu’il met sur le compte de l’alcoolisme et de l’homosexualité. Le tsar propose à l’exilé de prendre le poste convoité de bouffon du tsar.

Venant du pays de Shakespeare, Boris Johnston pourra parfaitement remplir ce rôle. Il pourra conserver sa coiffure, et son nom de scène de Bojo. Il aura droit de tout dire au tsar, conformément au statut de bouffon, à condition de faire rire. Bojo n’ignore pas le châtiment réservé au bouffon qui ne fait pas rire.

Le tsar a déjà passé commande d’un numéro de cirque sur la démocratie occidentale.

En remerciement, le tsar invitera de temps en temps son bouffon à des séances de musculation, dans sa salle de sport privée.




 

mardi 5 juillet 2022

Le narratif poutinien, 77. Dynastie

Si le tsar Vladimir premier ne sourit jamais, c’est qu’il est concentré sur l’objectif qu’il s’est fixé et que lui seul connaît, mais aussi qu’un tourment le hante depuis de longues années. Il n’a pas de descendant mâle, et il est inquiet pour l’avenir de la dynastie.

Son épouse lui a donné deux filles, Maria et Ekaterina. Elles sont belles et fortunées, mais ce ne sont pas des héritiers. Une femme de ménage, pourtant issue du peuple, n’a pas fait mieux : encore une fille, Elizaveta. Elle a été répudiée. Le tsar entretient le mystère au sujet de sa descendance avec l’acrobate Alina, deux enfants, trois enfants, quatre enfants, dont un mâle, et peut-être même des jumeaux, mais ils sont si jeunes que leur père voudrait hâter leur croissance pour qu’ils montent très vite sur le trône de la Petite Russie, ex-Ukraine, après qu’elle aura été entièrement rasée et russifée.

Ce qui ronge aussi le tsar Vladimir, c’est le traumatisme de sa gymnaste privée de nourriture parce que son entraîneuse la jugeait trop grosse. Penser que son Alina n’a pas mangé de caviar à sa faim pour devenir la femme la plus souple du monde lui donne encore les larmes aux yeux. Et pourtant, le tsar Vladimir sait contenir ses émotions.

dimanche 3 juillet 2022

Le narratif poutinien, 76. Tour de France 2023

Le Tour de France 2022 étant parti du Danemark, le tsar Vladimir premier a proposé au directeur de la Grande Boucle que l’édition 2023 s’élance depuis Donetsk, la capitale du Donbass.

L’épreuve comprendra des sections de vélocross pour traverser les rivières à l’endroit des ponts détruits par l’armée ukrainienne.

Le tracé du Tour empruntera des routes défoncées par des obus, qui n’auront rien à envier aux pavés de l’Enfer du Nord.

La possibilité qu’un missile, tiré par l’armée ukrainienne pour faire croire au monde qu’il s’agit d’un missile russe, tombe sur le peloton et sur la foule des spectateurs, relancera l’intérêt de la course à chaque étape.

L’arrivée triomphale aura lieu sur la Place Rouge, le tsar remettant en personne le trophée au vainqueur.

samedi 2 juillet 2022

Le narratif poutinien, 75. Montrer ses muscles

Le tsar Vladimir premier s’est repassé la vidéo où l’on voit les dirigeants du G7 assis autour d’une table ronde. Le bad boy Boris Johnston a lancé les hostilités puériles contre la personne du tsar en suggérant qu’ils pourraient tomber la veste pour montrer leurs pectoraux, plus durs que ceux du tsar posant torse nu.

Le tsar Vladimir remercie le président Emmanuel Macron de ne pas avoir pris part à l’échange des propos injurieux, et d’avoir souri, certes un peu, mais moins que les autres.

Lui sait qu’on ne plaisante pas avec la force brute, quand le cavalier conduit sa monture comme un cosaque ou quand il manie une kalachnikov.

Le tsar a répondu au monde que l’exercice physique permettait d’être sain dans son corps et dans son âme, à condition d’être sobre, comme son ami Gérard Depardieu.









vendredi 1 juillet 2022

Le narratif poutinien, 74. Faire ses courses

Après avoir visionné les images du centre commercial de Krementchouk, et s’être informé de ce qui s’est réellement passé, le tsar Vladimir premier a fait connaître ses conclusions.

Il est évident que ces poutres harmonieusement enchevêtrés et les cendres aux coloris dégradés du blanc au noir est une mise en scène d’un performeur ou d’un cinéaste en train de tourner un film de propagande. Les cadavres ont été apportés sur le lieu du tournage, après avoir été volontairement carbonisés. Si les clients étaient morts sur place, les cadavres seraient plus frais. Quel intérêt aurait eu l’armée russe à gaspiller un missile sur un centre commercial ?

Le missile est tombé sur un entrepôt qui abritait un stock d’armes offensives livrées par les pays étrangers. Le feu s’est ensuite propagé au centre commercial voisin, qui d’ailleurs était vide à cette heure-là.

Il est fortement déconseillé aux Ukrainiens de faire leurs courses dans des supermarchés voisins des dépôts de munitions. Et comme tous les locaux qui ont un toit sont susceptibles de contenir des armes, il est déconseillé aux Ukrainiens de faire leurs courses. Il est d’ailleurs déconseillé définitivement aux Ukrainiens d’habiter l’Ukraine.



 

dimanche 26 juin 2022

Le narratif poutinien, 73. Message amical à Donald Trump

En apprenant que la Cour suprême des États-Unis venait d’annuler le droit à l’avortement, le tsar Vladimir premier a envoyé un message à son homologue le président Donald Trump.

Il le félicite d’être toujours au pouvoir, même après qu’on lui a volé son élection. Il peut compter sur l’aide de la Russie pour gagner la prochaine en 2024. Le tsar pourra le conseiller utilement pour modifier la constitution, afin de rester au pouvoir pendant trente ans.

La prochaine décision de la Cour suprême des USA consistera à interdire le mariage entre personnes de même sexe et à persécuter les gays et toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. En adoptant les lois déjà en vigueur dans la Sainte Russie, l’Occident aura peut-être une chance de commencer sa régénération.

Dans la loi anti-avortement, le tsar se réjouit surtout qu’elle soit applicable même en cas de viol. Cette exception aurait pu donner de mauvaises idées aux femmes ukrainiennes.


samedi 25 juin 2022

Le narratif poutinien, 72. La faute à Rousseau

Pour se délasser de ses longues journées harassantes, penché sur les cartes, le tsar Vladimir se fait lire par son ministre de la Culture quelques classiques. Le hasard du jour s’est porté sur une traduction du Contrat social, un vieux délire démocratique du citoyen paranoïaque Jean-Jacques Rousseau. Justement, il parle de la Russie.
Tel peuple est disciplinable en naissant, tel autre ne lʼest pas au bout de dix siècles. Les Russes ne seront jamais vraiment policés, parce quʼils lʼont été trop tôt. Pierre avait le génie imitatif; il nʼavait pas le vrai génie, celui qui crée et fait tout de rien. Quelques-unes des choses quʼil fit étaient bien, la plupart étaient déplacées. Il a vu que son peuple était barbare, il nʼa point vu quʼil n’était pas mûr pour la police ; il lʼa voulu civiliser quand il ne fallait que l’aguerrir. Il a dʼabord voulu faire des Allemands, des Anglais, quand il fallait commencer par faire des Russes ; il a empêché ses sujets de devenir jamais ce quʼils pourraient être, en leur persuadant quʼils étaient ce quʼils ne sont pas. Cʼest ainsi quʼun précepteur français forme son élève pour briller au moment de son enfance, et puis nʼêtre jamais rien. LʼEmpire de Russie voudra subjuguer lʼEurope et sera subjugué lui-même. Les Tartares ses sujets ou ses voisins deviendront ses maîtres et les nôtres : cette révolution me paraît infaillible. Tous les rois de lʼEurope travaillent de concert à lʼaccélérer.
Le tsar n’est pas sûr d’avoir bien tout compris. Mais il a demandé que la phrase vers la fin soit réécrite avant la diffusion du livre dans les bibliothèques : « L’Empire de Russie voudra subjuguer d’Europe, et l’Europe, par faiblesse et lâcheté, se laissera subjuguer. » Et on supprima ce qui concerne les Tartares, qui n’est plus d’actualité.

vendredi 24 juin 2022

Le narratif poutinien, 71. Terres de sang

Le tsar Vladimir premier s’est fait résumer le livre d’un occidental décadent, Timothy Snyder, Terres de sang. L’Europe entre Hitler et Staline.

L’auteur prépare un appendice dont le tsar a eu communication. Il consiste en trois images commentées.


Le tsar Vladimir premier devant une carte de la Grande Russie. Le vert domine, mais une petite surface se colore en rouge brique, correspondant à peu près aux états satellites qu’il n’est pas encore besoin de délivrer : Ouzbékistan, Kazakhstan, Tadjikistan.



Grâce à nos armées de libération, les provinces de l’est de l’Ukraine ont retrouvé des couleurs.



La Russie délivre l’Afrique de la colonisation occidentale, qui l’a mise à feu et à sang. L’Afrique noire devient l’Afrique rouge.

mercredi 22 juin 2022

Le narratif poutinien, 70. L’Assemblée nationale et la Douma

Aussitôt après avoir pris connaissance des résultats catastrophiques des élections législatives en France, le tsar Vladimir premier a envoyé un message de condoléances à son homologue de l’Élysée.

Il l’invite au Kremlin pour une rencontre en tête à tête de part et d’autre d’une table qui, la guerre contre le virus étant en bonne voie, sera raccourcie. Le tsar expliquera au Président comment fonctionne une démocratie saine et stable.

Le mot Douma vient d’un verbe russe qui signifie « penser », mais il n’est pas nécessaire de le savoir. Elle se compose de 450 députés, dont 325 sont favorables au gouvernement et 67 autres le soutiennent. Il reste 57 communistes nostalgiques, c’est-à-dire 8% des élus. Une démocratie sans opposition fonctionne plus efficacement. Il se passe ainsi très peu de temps entre la proposition d’une loi et son adoption, sans amendements ni débats.

Le tsar ajoutera que les femmes ne représentent que 16,22% des députés, ce qui abrège considérablement les discussions. 



lundi 20 juin 2022

Le narratif poutinien, 69. Julian Assange

Quand le tsar Vladimir premier a su que Londres avait signé le décret d’extradition de Julian Assange vers les États-Unis, il a aussitôt offert l’asile politique au fondateur de Wikileaks.

S’il est jugé aux États-Unis, le lanceur d’alerte risque 175 années de prison, à comparer avec les neufs ans justement mérités par le terroriste Alexeï Navalny pour escroquerie et offense à magistrat. Âgé de 45 ans, il aura purgé sa peine à 54 ans, alors que Julian Assange ne sortira des geôles américaines qu’à 225 ans.

Au cas où Julian Assange pourrait apporter en Russie des révélations nouvelles sur les crimes de guerre commis par les armées américaines en Irak et en Afghanistan, en plus des 750 000 documents militaires et diplomatiques déjà publiés, il se verrait remettre un passeport et une datcha à son arrivée.

dimanche 19 juin 2022

Le narratif poutinien, 68. Céline, Guerre (pages inédites)

C’est des méchants, les Russkoffs, parole de Ferdinand, moi je peux le dire, je les ai vus sur le terrain. Et bêtes avec ça.
Ils y sont pour rien, les appelés qu’on a envoyés là. On leur a dit que l’Ukraine, ça n’existe pas, c’est une tâche blanche sur la carte. Ils savent pas où ils sont ni que ni quoi.
On leur a dit c’est pour un petit entraînement, comme qui dirait une promenade de santé, une musculation des jambes comme le chef Poutine tous les matins pour garder la forme, il y aurait de la vodka à l’arrivée et des filles à tringler qui les attendent.
Les petits gars de 18-19 ans ils connaissaient le monde seulement à la télé russe, qu’ils regardaient de leur trou sans être jamais sortis. Sous l’uniforme, ils allaient prendre l’air et gagner plus de roubles qu’à rien faire. Alors, ils sont partis, les cons.
Ils ont dessiné un grand Z avec du goudron sur leur tank et en avant ils sont partis.
Avec des provisions pour trois jours dans le barda, pas plus. Et prenez ce paquet-là aussi, un uniforme propre, chamarré et tout, pour la parade du quatrième jour.
Mais en arrivant, le comité d’accueil, c’était pas ça. Ils ont demandé aux galonnés où qu’ils étaient, ce qu’ils faisaient là, et pourquoi les femmes on n’en voyait pas à l’accueil.
À force qu’on leur a pas répondu, ils sont devenus fous, et vicieux par-dessus le marché. Je vais raconter tout ce que j’ai vu, et c’est pas beau à dire. Ferdinand a été témoin de tout ça, jusqu’où l’humanité peut tomber.


 

samedi 18 juin 2022

Le narratif poutinien, 67. Liste de courses

Le tsar Vladimir premier s’est fait communiquer la liste des armes dont le comédien Zelensky a passé commande à ses fournisseurs occidentaux.


De son côté, le ministère de la défense russe déclare avoir bombardé un entrepôt où étaient stockées des armes livrées par l’ennemi occidental. L’arsenal militaire détruit s’établit ainsi :

1000 obusiers de calibre 155mm
300 lance-roquettes multiples
500 tanks
2000 véhicules blindés
1000 drones

Les prochains communiqués officiels sont prêts. Il suffira de remplir les blancs correspondant aux types et au nombre d’armes détruites.

vendredi 17 juin 2022

Le narratif poutinien, 66. UKR dans l’UE

Consulté par le président Macron, soucieux de ne pas humilier son homologue russe, le tsar Vladimir premier a bien voulu faire connaître ses conditions pour l’adhésion de l’Ukraine à l’Union Européenne :

– que le comédien Volodimir Zelensky s’habille correctement, en costume et avec cravate ;

– que les Ukrainiens passent individuellement un examen de langue russe sans accent ;

– que l’Ukraine verse en rouble des dommages de guerre pour réparer les pertes occasionnées dans l’armée de libération ;

– que l’Ukraine reprenne son véritable nom de « Petite Russie ».

jeudi 16 juin 2022

Le narratif poutinien, 65. Gare au train

Le service du contre-espionnage russe signale un train fantôme parti de Pologne et faisant route vers Kiev, sans autorisation du Kremlin, avec à son bord trois individus qui se font passer pour le président de la République française Macron, le chancelier allemand Scholz et le chef du gouvernement italien Draghi. Les sosies ont été bien choisis, mais ils sont un peu trop ressemblants pour être les vrais dirigeants qui, de plus, voyagent normalement en avion.

Il s’agit en fait de trois terroristes venus s’enrôler dans l’armée ukrainienne pour combattre les forces de libération russes, et le train, maquillé en wagons de luxe, transporte du matériel de guerre.

Le communiqué officiel est déjà rédigé : c’est l’armée ukrainienne qui a fait dérailler le train quand il franchissait un pont, pour faire croire à la responsabilité de la Russie.