mardi 19 juillet 2022

Le narratif poutinien, 86. Anéantir

Six mois après sa sortie en France, le dernier roman de Michel Houellebecq a été traduit en russe, sous le titre уничтожить. Pour se délasser, entre deux ordres de bombarder des écoles et des hôpitaux où se cachent des Ukrainiens soldats ou qui pourraient le devenir, le tsar Vladimir premier a demandé au ministre de la Culture de lui résumer le livre.

Il avait entendu dire que Houellebecq anticipait les événements à venir dans ses fictions. Ainsi, il avait prévu les attentats islamistes, les gilets jaunes, enfin des choses dans ce genre-là. Anéantir, c’était un titre prémonitoire pour l’intervention militaire spéciale de la Grande Russie contre les Nazis de l’Ouest. Même pas : dans le roman, il n’est question que de l’anéantissement individuel d’un personnage qui se meurt d’un cancer. La seule chose que le roman annonce, c’est le scandale des maisons de retraite.

Ah si, quand même, Houellebecq parle de la décadence de la civilisation et du Vieux monde : « Même des dirigeants aussi autoritaires et déterminés que le général de Gaulle s’étaient montrés impuissants à s’opposer au sens de l’histoire, l’Europe dans sa totalité était devenue une province lointaine, vieillissante, dépressive et légèrement ridicule des États-Unis d’Amérique. » Là, c’est un vrai voyant qui parle et il a senti le « sens de l’histoire », qui vient de l’Est.

Mais dans l’ensemble, la star mondiale de la littérature française, traduit dans toutes les langues, sauf l’ukrainien qui n’existe plus, a perdu de sa force de prédiction, il est devenu trop sentimental, trop tendre et ramolli avec l’âge. Le tsar Vladimir lui a écrit pour lui proposer le sujet de son prochain roman, un sujet prophétique sur l’avenir de la civilisation.

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