mercredi 1 mars 2017

Chez nous, film de Lucas Belvaux


De la difficulté à faire un film politique. Dès le titre, Chez nous, reprenant le slogan xénophobe « On est chez nous », l’explicite crée le malaise. La gêne persiste avec la femme blonde, fille de son père, les noms de lieux décalqués, les discours à la lettre. Heureusement, une intrigue forte, et vraisemblable, entraîne dans la fiction. Un documentaire peut s’en prendre frontalement au Front, mais on se dit qu’un film politique se doit de trouver un biais pour traiter le sujet, de construire une fable, une allégorie, un symbole. Un peu de distance, un angle d’attaque indirecte, un détour pour viser juste et décoller du particulier vers le général. Dans Merci, patron, la dérision réussit, à partir d’une situation particulière, à susciter l’adhésion du spectateur sans peser par la lourdeur d’une thèse. Reste dans Chez nous le jeu sensible des acteurs, et ces plans sur les rues désertes aux maisons de briques alignées (il est loin, le temps où Enrico Macias chantait les gens du Nord aux maisons alignées « par souci d’égalité »), les champs nus, les ruines industrielles, la géométrie déprimante des escaliers d’immeubles. C’est là le vrai message politique du film.

La droite fracturée, la gauche explosée, le centre écartelé, la France en morceaux. Il se trouvera bien un éboueur pour ramasser les débris, c’est-à-dire nous.

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