L’annonce d’une catastrophe, d’un drame collectif, d’un accident
spectaculaire se termine généralement par une phrase qui tient lieu de chute:
«Une cellule psychologique a été mise en place». Un crash aérien
Cellule psychologique. Un suicide sur le lieu de travail? Cellule psychologique. Le naufrage d’un paquebot abandonné par son capitaine?
Cellule psychologique. Tout est dit. On peut passer à un autre sujet.
Le mot «cellule» rassure. C’est une petite structure
close, qui nous protège. Notre corps en est fait. Les cellules grises aident à
penser. Telle eau minérale rajeunit nos cellules. Les PC (pas les ordinateurs) étant
morts, on a oublié l’autre sens de cellule, qui sentait le renfermé.
Avant l’invention des cellules psychologiques, le travail de
deuil durait longtemps, comme un travail artisanal, un travail de soi sur soi.
Après la période de grand deuil (six mois), venait le demi-deuil (six mois
encore). Une année perdue, retirée du monde, des plaisirs, des distractions.
Impensable dans un monde pris par la vitesse. Le deuil suit le rythme. «Les
morts vont vite», disait Chateaubriand. Un drame chasse l’autre. La
cellule psychologique remet très vite les traumatisés dans le flux des
échanges, remet dans le circuit production - consommation, rebranche sur les réseaux, sans période de latence, et elle assure pour l’informateur et l’informé l’enchaînement rapide des faits divers violents. Nous sommes dans le monde simple et immédiat des slogans: Mars et ça repart, Urgo est là et la douleur s’en va.
Si une cellule psychologique est en place, alors tout va bien, c’est
presque comme s’il ne s’était rien passé.
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