samedi 28 janvier 2012

Cellule psychologique

L’annonce d’une catastrophe, d’un drame collectif, d’un accident spectaculaire se termine généralement par une phrase qui tient lieu de chute: «Une cellule psychologique a été mise en place». Un crash aérien  Cellule psychologique. Un suicide sur le lieu de travail? Cellule psychologique. Le naufrage d’un paquebot abandonné par son capitaine? Cellule psychologique. Tout est dit. On peut passer à un autre sujet.
Le mot «cellule» rassure. C’est une petite structure close, qui nous protège. Notre corps en est fait. Les cellules grises aident à penser. Telle eau minérale rajeunit nos cellules. Les PC (pas les ordinateurs) étant morts, on a oublié l’autre sens de cellule, qui sentait le renfermé.
Avant l’invention des cellules psychologiques, le travail de deuil durait longtemps, comme un travail artisanal, un travail de soi sur soi. Après la période de grand deuil (six mois), venait le demi-deuil (six mois encore). Une année perdue, retirée du monde, des plaisirs, des distractions. Impensable dans un monde pris par la vitesse. Le deuil suit le rythme. «Les morts vont vite», disait Chateaubriand. Un drame chasse l’autre. La cellule psychologique remet très vite les traumatisés dans le flux des échanges, remet dans le circuit production - consommation, rebranche sur les réseaux, sans période de latence, et elle assure pour l’informateur et l’informé l’enchaînement rapide des faits divers violents. Nous sommes dans le monde simple et immédiat des slogans: Mars et ça repart, Urgo est là et la douleur s’en va.
Si une cellule psychologique est en place, alors tout va bien, c’est presque comme s’il ne s’était rien passé.


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