samedi 9 novembre 2024

King Trump. 1

Un doigt pointé vers le public. On croyait à une mise en scène de showman, désignant au hasard une personne dans la foule et chacun peut se sentir distingué dans son individu, mais non, c’est le geste d’un shotman et chacun doit se sentir visé.

Dans l’un de ses derniers discours de campagne, King Trump s’est laissé aller à une petite impro, à propos de la vitre blindée qui le protège : « Si on veut m’atteindre, il faut tirer à travers les journalises… Ce qui ne me dérangerait pas trop. » Certains journalistes ont cru bon de protester contre l’honneur d’être des boucliers humains. Son directeur de communication leur a répliqué en trois points : 1) King Trump faisait de l’humour 2) King Trump parle toujours sérieusement : il mettait en garde les journalistes contre le danger qu’ils couraient sans protection au premier rang de ses meetings 3) Les paroles de King Trump n’ont pas à être commentés par les journalistes. Comme Dieu, dont il est le représentant sur terre, King Trump parle en utilisant des paraboles que le commun des journalistes ne peut pas comprendre.

Maintenant qu’il est élu, il ne reste plus à King Trump, âgé de 78 ans, pour devenir un mythe américain, après une campagne si riche en rebondissements, emporté par la rage assouvie, la vengeance consommée, le ressentiment satisfait, qu’à mourir d’une crise cardiaque.



mardi 5 novembre 2024

Trump et Shakespeare

Pour écrire son histoire de bruit et de fureur, Trump cherche son Shakespeare. Sur fond de chaos cosmique, de chaosmos, il y a aura sur le trône un bouffon bavard.

Tous les matins au petit déjeuner, il boit le sang d’un enfant portoricain pour rester jeune.

Le gâtisme de Biden (81 ans) le fait bredouiller et perdre ses mots. Trump (78 ans) au contraire se lâche, victime de diarrhée verbale, tournant en boucle dans le même manège, répétant la même mécanique du geste, doigt pointé vers la foule, mains écartées puis resserrées pour délimiter un petit espace.

Ce n’est pas un cadeau pour les humoristes, car il pousse si loin sa propre caricature qu’on ne peut guère rivaliser, mais pour les écrivains qui jouent des frontières entre réalité et fiction. Les faits sont faux et les mensonges vrais, si bien que les parallèles entre les mondes possibles et le monde donné se rejoignent. Trump est le fils légitime de Jean Cocteau, « je suis un mensonge qui dit toujours la vérité », et de Louis Aragon, auteur du Mentir-vrai.



mercredi 30 octobre 2024

Ne pas se trumper

Les USA sont divisés en deux moitiés égales comme une cour de récréation, où les enfants face à face se renvoient en miroir : c’est pas moi le fou, c’est toi, c’est celui qui le dit qu’y est, c’est tes copains les déchets, non c’est les tiens les ordures.

Quel que soit le résultat, pour l’autre camp et pour les deux, les USA seront dirigés par un fou ou une folle, soutenu.e par des ordures.

Les USA étant la première puissance mondiale, il serait légitime de faire voter le monde entier, au lieu d’avoir recours à ce système électoral bancal. Mais on risquerait de se trouver dans le même cas de figure d’un résultat à fifty-filty, l’Occident d’un côté, le Sud global de l’autre.

Steve Bannon, ancien et toujours conseiller de Trump, lui a donné un conseil stratégique pour miner le terrain : « Inonder la zone de merde ! » Ce conseil métaphorique n’impliquait pas forcément l’usage du mot lui-même, mais il n’est pas surprenant qu’il ressurgisse tel quel dans la bouche de son élève, quand il traite son adversaire de « vice-présidente de merde ».

Les démocraties offrent aux régimes autoritaires le spectacle de leur propre décomposition, par la tête, comme le poisson pourri.

On en viendrait presque à souhaiter que le mauvais perdant gagne, pour éviter qu’il ne déclenche une guerre civile en cas de défaite.



dimanche 20 octobre 2024

Mobilités douces

Le camion enfonce la voiture, la voiture écrase le vélo, le vélo renverse la trottinette, la trottinette percute le piéton.

On a même vu un automobiliste sortant le bras de la portière, agrippant un piéton et le traînant en accélérant : « Maintenant, tu vas courir ! »

Ces exemples de cohabitation dans l’espace partagé offre une juste image, en raccourci, des circulations apaisées des personnes et des marchandises dans un monde mondialisé.



mercredi 16 octobre 2024

Le budget du ministre

Bruno Le Maire a obtenu un poste de professeur d’économie et de géopolitique à l’université de Lausanne, pour un salaire en francs suisses non communiqué. À ses étudiants, il va enseigner qu’il ne sait toujours pas ce qu’est un ultra-riche.

Il n’est en effet pas possible de clairement distinguer un ultra-pauvre d’un pauvre, un pauvre d’un moyennement riche, un moyennement riche d’un très riche et un très riche d’un ultra-riche. Tout est une question de curseur. En fait, il existe un continuum de la richesse dans la population, ce qui permet de dire qu’il n’y a ni riche ni pauvre.

Les pauvres étant infiniment plus nombreux que les riches, imposer les pauvres rapporte plus que taxer les riches.

Tailler dans les dépenses publics, supprimer des trains, diminuer le nombre de fonctionnaires dans les hôpitaux, les écoles, les gendarmeries, est la solution la plus juste socialement, puisqu’elle touche tout le monde, les riches comme les pauvres.

Si les riches s’appauvrissent, le ruissellement sur les pauvres sera réduit à quelques gouttes de liquidité.

Les ménages les plus aisés, soit 0,3 ou 0,6% de la population, seront priés de bien vouloir consentir à un léger effort fiscal pour combler une toute partie de la dette, sous la forme d’une augmentation minime de leur impôt, limitée dans le temps, douce, indolore, si bien qu’ils ne s’apercevront même pas qu’ils consentent un sacrifice pour sauver la nation de la banqueroute.

La gauche voudrait augmenter les impôts des plus riches ; la droite refuse qu’on augmente les impôts de tous les Français. On voit bien qui parle au nom de l’égalité et du bien commun.



 

 

jeudi 10 octobre 2024

Le narratif poutinien, 164. Retenez-vous, retenez-le

Nous, Vladimir premier, tsar de la Grande Russie et au-delà, sans frontière et hors frontière

bouleversé par les images de la guerre au Moyen-Orient ;
effondré en voyant tous ces immeubles détruits à Gaza et au Liban ;
meurtri à chaque fois qu’une bombe frappe un hôpital ou une école ;
affligé quand on lui rapporte le macabre décompte des victimes civils innocentes, des femmes, des enfants ;
révolté par la cruauté des hommes qui nient l’existence d’autres hommes,

Nous donc, Vladimir premier, appelons les belligérants à une retenue raisonnable.



jeudi 3 octobre 2024

Jean-Marie Le Pen a encore toute sa tête

Souffrant d’une altération de ses facultés cognitives, Jean-Marie Le Pen n’est pas en état de comparaître au procès des assistants parlementaires de l’ancien Front National. Il a cependant été filmé le samedi 28 septembre 2024 à son domicile, assis mais jubilant, en train de chanter avec un groupe de musiciens qui ne détestent pas taquiner la muse néonazie. Sa fille porte plainte pour abus de faiblesse.

Le Menhir de 96 ans proteste contre sa fille qui veut le protéger et le faire taire en le présentant comme sénile :  il a toutes ses facultés, il a encore assez de souffle pour pousser la chansonnette, et assez de mémoire pour se souvenir des airs qui l’ont bercé.

Il est bien connu que ce qui part en dernier, quand la tête s’en va, ce sont les premières choses apprises et gravées dans la mémoire longue, les tables de multiplications, les poèmes pour la fête des mères, les fables de la Fontaine. Même s’il a perdu la mémoire immédiate, au point d’ignorer que Marine a été élue présidente de la République et que Jordan est premier ministre, Jean-Marie peut encore chanter les chants nazis de son enfance, tatoués pour toujours dans son cortex cérébral.